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    Cher enfoiré petit Papa  Noël,

     Je  suis pas contente. Du tout. Tu déconnes. D'accord, je veux bien croire qu'avec tes histoires de délocalisation, la mise en place des normes ISO et tes  Rennes qui veulent plus rien branler tu t'en sors pas,  mais quand même ! 

    Je t'explique : tu  m'as livré il y a un mois le modèle Edition  limitée Ken Guacamole, tu sais, le BBB, Beau Brun aux yeux Bleus.Celui  avec le sourire Email Diamant et le brushing Petrolane. L'avocat trentenaire, parfait pour les cinquante prochaines années.  Le Ken Guacamole tout beau tout propre que les  parents commandent   pour leur Barbie quand le  Ken Bistouri est en rupture de stock.

    Et ben je te dis pas MERCI !!!
    Il est tout pourri ton cadeau !!

    Pourtant  c'était plutôt bien parti. Même que ce jour là tu m'avais aussi offert  un Ken Ingénieur BGB,  Beau Grand Blond -Mais celui-ci, on en a déjà parlé ensemble, tu as compris pourquoi j'en voulais pas dans  ma lettre du 31 octobre, alinéa 7-  Je t'avoue même ça m'avait  un peu étonnée que tu me livres deux Editions limitées le même jour sachant  que j'ai pas  eté extraordinairement  gentille cette année.. Surtout  avec les cons. 

    Faut dire aussi que je m'y attendais plus vraiment,  parce que ça va   BIENTOT FAIRE  TRENTE ANS   que j'ai passé ma commande !!
    Alors déjà, entre nous, faut bien avouer que le  modèle que tu m'as livré l'année dernière, c'était vraiment n'importe quoi ! Si si, j'te l'dis. Sur ce coup là, t'as encore  déconné. Il a  tenu un an. Et Pouf ! Cassé le Ken Sport !
    Oui, il  était très très beau ton  Ken Sport.
    Oui, il était très très musclé ton Ken Sport.
    Oui oui.
    OUI-OUI, c'était ça le problème..

    Et alors le Ken Opéra il était pas mal aussi mais il prenait trop de petits cachets qui font dormir et je  pouvais pas jouer avec...

    Du coup quand j'ai vu arriver le Ken Guacamole le mois dernier, j'ai eu très envie de déchirer le papier cadeau et de  lui faire faire tous pleins d'essayages ! Sauf que je suis une poupée sage et bien élevée. Ton Ken aussi, il est bien programmé, il a fait tout comme il faut : 

    Semaine 1 :
    Ken Guacamole a dragué  magwann élégamment.
    Ken  Guacamole a raccompagné magwann devant chez elle avec sa voiture( nb : s'il te plait Père Noël, ne livre plus de Ken avec la voiture quand le Ken a son permis depuis un mois seulement. C'est criminel ).
    Ken Guacamole a demandé poliment  le numéro de téléphone de magwann

    Semaine 2 :
    Ken Guacamole a donné RDV à magwann
    Ken Guacamole a été charmant.
    Ken Guacamole a fait raccompagner magwann par son meilleur ami, un autre Ken Guacamole ( modèle vintage)
    Ken Guacamole a proposé à magwann  d'aller danser semaine trois

    Semaine 3 :
    magwann apprend  par Ken Guacamole Vintage que Ken Guacamole joue déjà avec Barbie divorcée
    magwann est  très très mécontente et  dit à Ken Guacamole qu'elle ne  joue pas à ce jeu là
    Ken Guacamole est pas content après Ken Guacamole Vintage

    Semaine 4 :
    Ken Guacamole veut expliquer à magwann les règles du jeu
    magwann et Ken Guacamole vont hier soir  au Garage vers Parmentier 
    Ken Guacamole veut  jouer avec Barbie divorcée, pas elle. Alors Ken Guacamole voudrait jouer  avec Magwann si Barbie divorcée ne veut vraiment pas jouer avec lui.
    magwann très très déçue du Ken Guacamole et le renvoie pour défaut de fabrication
    Ken Guacamole a un bug  et dit  à magwann «  On t'a déjà dit que t'as un air de Catherine Zeta Jones ?

    Sans déconner !! SANS DE-CON-NER !!!
    C'est quoi ces cadeaux tout pourris Père Noël  ?? !! 

    Alors d'une, Pére Noël: question délais de livraison, zéro pointé !!Vais pas attendre encore trente ans avant de l'avoir mon cadeau !
    Et de deux : on avait dit un KEN, pas un CRAPEAU déguisé en Ken !! Merde quoi !
    Et de trois : fais gaffe, vais changer de boutique, parait que chez IamYourTarget, ils font des modèles carrément mieux.

    Papa, maman, ‘ pouvez enlever un couvert.  


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  •   Station Parmentier. Un pauvre type  est monté, engoncé dans sa veste gris chiné toute rapée. La cinquantaine cruelle. Clac des portes.  J'ai pensé : "encore un type dans la déche". Chasser la pensée. Vite. Apprendre à cloisonner ses émotions. Ne  pas céder à l'empathie stérilisante sinon souffrir.

    Tellement commode.

    Focus : debout derrière lui, un colosse excentrique avec une queue de cheval incongrue  et un grand chapeau noir. Caricature : je l'imagine Corse revendicatif, sympathisant anti OGM, gourmet averti à la Veyrat. L'association de ces deux terriens m'amuse. Ils me tournent le dos.
    Soudain un chant s'élève : « Adieu Monsieur le Professeur ».La voix est forte, cassée, fausse.
    C'est l'homme au grand chapeau qui pousse la chansonnette.

    Forcément.

    Je pouffe de rire avec mon voisin de voyage. Tellement drôle et gonflé! J'hésite à sortir la caméra, envie de voler cet instant magique. Je savoure.
    Station. Clac des portes. Je descends. Un volte face : juste  une photographie des yeux. L'homme au chapeau noir ne chante pas. Son visage est fermé. Comme tous les  autres. Masse muette. Inquiète. Tapis derrière, une ombre s'égosille. Un râle rauque, le cri à la vie d'une veste gris chiné, gagne misère d'un petit homme ignoré.

     

    Les proportions qui  s'emmêlent, les distances qui  s'effondrent. Et cette  honte qui vous étouffe, ce sang qui reflue dans vos tempes, votre propre bêtise qui vous crache à la gueule et fait  exploser les particules de votre soit- disante bienveillance.
    magwann

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    Tu es  cette grande et frêle chose, embarrassée par toi-même
    Tu as cette beauté particulière
    Cette chevelure incroyable
    Et tes grands yeux verts

    Tu m'as dit : « Tu ne sais pas ce que c'est de ne pas pouvoir vivre ».

    Tu ne sais pas ce que c'est de ne pas pouvoir vivre.

    Tu ne sais pas ce que c'est de ne pas pouvoir vivre.

    Tu ne sais pas ce que c'est de ne pas pouvoir vivre.

    Tu es partie.
    Mon amie.
    Trois  mois déjà.

    Tu ne sais pas ce que c'est de ne pas pouvoir   vivre

    Je sais ce que c'est que  vivre
    Te survivre.

    Ciao Bella


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